Ignazio Cassis, conseil fédéral, directeur du DFAE

A propos de l'assemblée générale de scienceindustries

Discours du conseil fédéral Ignazio Cassis

Seul le texte prononcé fait foi.

*******

Après la chute du Mur, l’économiste politique Francis Fukuyama annonçait "la fin de l'histoire", l'Occident ayant apparemment gagné la partie. Aujourd'hui, cependant, il est clair que l'équilibre reste fragile. Les valeurs occidentales sont remises en question. La concurrence entre les grandes puissances et leurs systèmes sociaux – démocraties contre autocraties – se rallume de plus belle.

La Russie veut retrouver sa puissance d'antan. Mais sa politique étrangère révisionniste produit l'effet inverse : le pays est de plus en plus isolé, l'Europe s'est ressoudée et l'OTAN renforcée.

La Chine se tient aux côtés de la Russie, mais ne lui accorde pas d’appui militaire dans la guerre. Selon le vieil adage "diviser pour régner", elle étend son influence géostratégique et s'arme massivement. Elle se met en scène comme une puissance aux intentions pacifiques, mais porte en même temps toute son attention militaire sur Taïwan.

Les Etats-Unis restent la première puissance mondiale incontestée depuis la Seconde Guerre mondiale, mais la rivalité sino-américaine prend aujourd’hui des proportions planétaires. Les Américains exigent des autres États qu'ils choisissent leur camp et ils exercent sur eux à ce titre une pression croissante. En même temps, ils sont de plus en plus occupés par leurs propres problèmes.

Ces trente dernières années, l'Europe s'est installée dans une situation de confort. Puis est venue l’agression russe contre l’Ukraine. Cette attaque a détruit l'architecture de sécurité européenne et remis en question le système de valeurs occidental. Notre continent a pris conscience de sa dépendance vis-à-vis des grandes puissances : gaz russe - marchandises chinoises - armes américaines.

Le monde devient ainsi moins globalisé, moins occidental, moins démocratique, partant plus problématique. La dynamique de solidarité née après 1945 s'essouffle et les mécanismes de prévention d'un nouveau conflit mondial - à commencer par ceux de l'ONU - sont en plein bouleversement. Pour l'Occident - et pour la démocratie - ce n'est pas une bonne nouvelle.

Dans la situation mondiale qui est celle d’aujourd’hui, la Suisse peut-elle vraiment se permettre de n'avoir pas de relations dûment réglées avec son voisin et principal partenaire commercial ?

Nous devons avoir et garder une vue d’ensemble de la situation. C’est cette optique qui a poussé les membres de l'UE à se rapprocher à cause de la guerre. Et c'est pourquoi la Suisse a fait de même.

En février dernier, le Conseil fédéral a défini son plan de consolidation et de développement de la voie bilatérale. Santé, électricité, recherche, commerce, transports, finances : partout des relations bien réglementées s’imposent pour consolider l'économie suisse axée sur l’exportation et accroître sa prospérité. Nous y travaillons d’arrache-pied en ce moment. L’important va être d'associer politique étrangère et politique intérieure : de nouvelles négociations ne seront entreprises que lorsqu'une base solide aura été définie en commun.

Un proverbe africain dit : "Si tu veux aller vite, vas seul. Si tu veux aller loin, chemine avec d'autres".

La route est longue et semée d'embûches, parcourons-la ensemble.

Les propos ci-dessus sont une version abrégée du discours du Conseiller fédéral Ignazio Cassis, prononcé le 26.5.2023 à Bâle dans le cadre de l'Assemblée générale de scienceindustries.
Pour le discours complet, veuillez cliquer ici.